En regroupant des informations les plus objectives possible et en quantité suffisante pour montrer que l'intérêt tourné vers le Japon en Occident était non négligeable, et que quel qu'il fût, il ne pouvait laisser indifférents ces architectes occidentaux au moment précis où ils donnaient une orientation nouvelle à leur architecture, on soulève aussi certaines question:
- tout d'abord, la question de distinguer la part réelle de l'information objective par rapport à l'information subjective, à savoir la distinction entre une attirance ouvertement avouée (et de quelque manière qu'elle soit traduite), et une influence détectée a posteriori par un historien ou un critique;
- d'autre part, la question de comprendre pourquoi c'est précisément l'architecture du Japon qui est concernée;
- et enfin, la question de
trouver le lien qui unit l'architecture japonaise à l'architecture
moderne, qui puise dans une tradition qui n'est pas la sienne et qui lui
est même paradoxale.
Lorque l'on évoque la place du Japon dans l'activité architecturale en Occident, avec l'idée de déceler les traces d'une source d'influence, la distinction honnête entre une information effective et une interprétation doit rester perceptible.
Ainsi, les citations d'architectes qui reconnaissent avoir trouvé un enseignement dans l'architecture japonaise (comme on peut le trouver auprès d'un Maître, par une oeuvre ou un livre...) sont à confronter aux citations d'historiens et de critiques, aussi compétents soient-ils, qui cherchent à reconnaître la marque de cet enseignement, globalement ou ponctuellement.
On peut, par exemple, choisir deux textes, qui s'accordent à dire que "l'architecture traditionnelle japonaise est moderne": celui de Bruno Taut,
"L'architecte moderne reconnaîtrait avec étonnement, que cette construction (la Villa impériale de Katsura) est absolument moderne (...)."(1)
et, celui de Charles Jencks,
"L'architecture traditionnelle de Shinto et Katsura étaient elles-mêmes 'modernes' (...)."(2)
Ces deux témoignages reprennent la même idée, exprimée dans les mêmes termes simples, et pourtant, on ne doit pas leur accorder la même valeur, car c'est, en quelque sorte celui de l'architecte qui a pu alimenter celui du chercheur.
Et envers les architectes eux-mêmes, une attention particulière doit être portée sur la façon dont, directement ou indirectement, ils ont pu être en contact avec le Japon.
- Il y a ceux pour lesquels le Japon fut incontestablement présent: qu'il fasse partie de leur carrière (F.Ll.Wright, Charlotte Perriand), ou de leur vie (Bruno Taut), ou même aussi bien de leur vie professionnelle que personnelle (Antonin Raymond), ou enfin qu'il ne représente qu'une expérience passagère (Richard Neutra);
- ceux pour lesquels l'architecture japonaise faisait partie de leurs réflexions écrites bien qu'ils n'y aient jamais eu aucune expérience (Adolf Loos, Robert Mallet-Stevens voir annexe 6);
- ceux pour lesquels le Japon était présent, mais en fait plutôt représenté par le japonisme dont le contexte dans lequel ils évoluaient était empreint (Charles Rennie Mackintosh, Joseph Hoffmann, et les architectes Art Nouveau en général), auquels, on ne doit pas manquer d'ajouter ceux pour lesquels l'intérêt du Japon n'était autre que celui d'être à la mode;
- ceux pour lesquels des éléments de l'architecture traditionnelle japonaise peuvent être perçus dans leurs réalisations, mais qui n'y ont jamais cherché une justification (Ludwig Mies van der Rohe);
- et enfin, ceux pour lesquels
l'architecture japonaise représentait une illustration des théories
qu'ils avaient développées, mais qui mises en oeuvre n'en
gardaient pas l'image (Adolf Loos, Walter Gropius).
notes:
(1)DOHI, yoshio, Bruno Taut, sein Weg zur Katsura Villa, in B.Taut 1880-1938, Ademie der Künste, p.122, cite TAUT, Nippon.
(2)JENCKS, Charles, Mouvements
modernes en architecture, Mardaga, Bruxelles, 1978, p.358.